IA, Éducation, Formation et compte-rendu

L’évènement IA, Education et Formation (Photo : Qant)

L'intelligence artificielle bouleverse l'éducation et la formation. Hier matin, experts, enseignants et entrepreneurs ont débattu de ses enjeux lors de la matinale Qant au palais Brongniart à Paris.

Comment former et éduquer à l'heure de l'IA ? Avocats, fondateurs de start-ups et investisseurs ont tenté de répondre à cette épineuse question à l'occasion de la matinale « IA, éducation et formation » organisée jeudi 12 septembre en partenariat avec La Place. Le premier constat fait par l'ensemble des intervenants est clair : l'IA est incontournable, et il est essentiel pour le secteur de l'éducation et de la formation d'affronter frontalement les défis qu'elle apporte. « L'IA sera partie intégrante des métiers des générations futures. Il est essentiel que l'outil soit mis à disposition des élèves pour qu'ils y soient familiarisés avec un esprit critique » affirme Elise Dufour, associée du cabinet Bignon Lebray spécialisée en droit du numérique.

Acculturer, acculturer, acculturer

Une acculturation à l'IA qui s'explique notamment par un besoin d'en expliciter les limites. « Les étudiants et les collaborateurs d'entreprises n'ont aujourd'hui aucune conscience de la capacité des LLMs à halluciner » déplore Yann Battard, CEO d'ADN IA. Des risques qui forcent les entreprises à former leurs collaborateurs non seulement sur les bons usages des outils d'IA, mais aussi sur leurs limites : « En interne, nous formons nos collaborateurs à prompter efficacement, et à se méfier des hallucinations » explique le président de Fora Formation Gilles Lepoutre. Le défi est alors d'apprivoiser la technologie avant de vouloir à tout prix l'intégrer dans le processus d'enseignement. « Plutôt que vouloir mettre ChatGPT au cœur de la pédagogie, il faut que la pédagogie s'intéresse à ChatGPT » explique François-Xavier Petit, fondateur en 2016 de l'institut d'innovation technologique et sociale Matrice.

Preuve s'il en faut de la prudence nécessaire, les systèmes d'IA rattachés à l'éducation et à la formation professionnelle font partie des « systèmes à haut risque » identifiés par le tout jeune AI Act européen. Trois cas d'usage sont notamment cités : l'IA qui détermine l'affectation ou l'admission de candidats, l'IA qui évalue les acquis d'une personne, et celle qui surveille les comportements interdits. Yann Battard identifie lui un problème plus général à une utilisation abusive de l'IA : « On est en train de déléguer aux LLM notre capacité à rédiger et à parler. Or, le langage est la structure de la pensée. L'enjeu est de parvenir à s'augmenter grâce à l'outil, plutôt que de lui déléguer notre pensée. ». Un discours qui rappelle celui du chercheur Evgeny Morozov, qui va jusqu'à se demander si l'IA ne sert qu'à « automatiser l'humanité jusqu'à la rendre obsolète ».

Human in the loop

En l'occurrence, l'ensemble des intervenants s'accordent sur les dangers d'une automatisation totale de l'enseignement ou de la formation, et sur la nécessaire collaboration entre l'outil d'une part et l'humain d'autre part : « La question est de savoir comment on compose l'IA avec une intervention humaine. L'adaptative Learning est par exemple très pertinent dans une logique de remédiation et de parcours personnalisé, à condition que cela vienne aider sur des points spécifiques en parallèle d'un enseignement qui permet une socialisation » analyse François-Xavier Petit. « L'intelligence collective reste le meilleur moyen d'apprendre les usages de l'IA » abonde Francis Lelong, CEO de l'organisme de formation Alegria.

Dès lors, les opportunités identifiées de l'IA sont multiples. Une personnalisation de l'enseignement, par exemple, face à un éventail social des élèves beaucoup plus grand qui rend de moins en moins adapté un enseignement unique. Le déchargement des tâches administratives ou de la correction de copies pour les enseignants, mais aussi l'identification du décrochage et des difficultés grâce à la collecte permanente de données, sont encore évoqués. Face à toutes ces opportunités, certaines voix appellent néanmoins à la tempérance. C'est notamment le cas de Nicolas Steegman, créateur du logiciel de montage vidéo Stupleflix : « L'IA est utile si elle est accompagnée d'une intention. Or, le problème dans l'éducation, c'est la motivation. » L'intelligence artificielle est donc un outil potentiellement très efficace, mais elle reste un outil.

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